Vichy, le 3 mai 1980
à Monsieur Jean Daniel
Le Nouvel Observateur
Lettre recommandée avec accusé de réception
A PUBLIER
Monsieur,
Vous avez laissé sans réponse ma lettre du 21 juin de
l’année dernière. Je le regrette.
Dans ma lettre, je vous rappelais
une promesse que vous m’aviez faite au téléphone en mars 1979. Vous m’aviez dit
connaître des gens qui avaient été les témoins oculaires de gazages dans les
« chambres à gaz » allemandes. J’avais insisté pour avoir les
coordonnées de ces témoins. Je vous avais dit que j’allais notamment leur
demander comment on procédait pour entrer dans la « chambre à gaz »
pleine d’acide cyanhydrique et pour en extraire les corps eux-mêmes imprégnés
de ce redoutable poison. Vous m’avez répondu que ces gens étaient aux Etats-Unis
et que vous ne les verriez pas avant l’été (il s’agissait de l’été 1979). Je
vous ai alors dit que j’étais fâché de ce contretemps. J’ai ajouté que je vous
enverrais immédiatement une lettre qui ferait état de votre promesse ainsi que
de ma contrariété. Vous m’avez répondu que cette lettre était inutile. Puis,
comme j’insistais, vous m’avez dit avec fermeté : « Non. Vous ne m’enverrez
pas cette lettre ! »
Je crains que, d’une part, mon
insistance et, d’autre part, le fait que je vous aie tout de même envoyé une
lettre trois mois après notre conversation téléphonique ne vous ait froissé. Ne
m’en tenez pas rigueur. Souvenez-vous de mon opiniâtreté dans la recherche des
témoignages. Les rares fois où l'on m’a dit connaître des témoins de gazages
homicides, j’ai remué ciel et terre pour me mettre en rapport avec ces témoins ou
pour trouver trace de leurs écrits.
Dois-je, à ce propos, considérer
comme un témoignage de ce genre l’ouvrage que vous signalez à l’attention de
vos lecteurs dans votre dernier « document de la semaine » ? Il s’agit
de l’ouvrage intitulé Trois ans dans une chambre à gaz (Le témoignage
de l’un des seuls rescapés des commandos spéciaux), par Filip Müller, préface de Claude Lanzmann (Paris, Pygmalion /
Gérard Watelet, 1980, 252 p.).
Filip
Müller est pour moi une vieille connaissance. Il est abusif de prétendre,
comme il est dit dans le prière d’insérer, qu’il a « finalement décidé,
trente ans après, de se souvenir ». Il a décidé bien avant cela de de « se
souvenir ». Il s’est notamment « souvenu », devant le tribunal
de Francfort, au procès des « gardiens d’Auschwitz » de 1963-1965. Il a
été l’une des vedettes du procès. Une vedette malheureuse. Son ami Hermann
Langbein, secrétaire général du Comité international d’Auschwitz, a dû lui-même
en convenir dans son livre intitulé
Der Auschwitz Prozess (Eine
Dokumentation) (Europäische Verlagsanstalt, Vienne, 1965, 1027 p.). L’index
de ce livre vous fournira les références qui intéressent notre témoin. Lisez,
en particulier, les pages 459-463. Filip Müller était surtout venu à Francfort
pour y charger l’accusé Hans Stark dont il parle d’ailleurs longuement dans son
livre pour le charger encore plus. Or, l’avocat de Stark n’avait eu aucune peine
à démontrer, selon ses propres paroles, que la « déposition (du témoin Müller),
de A jusqu’à Z, ne tenait pas debout ». Quant au tribunal, tout montre qu’il
était d’une grande complaisance pour les témoins à charge. Il faut rappeler ici
qu’en 35 ans de procès pour « crimes de guerre » pas un seul faux témoin
n’a été poursuivi pour faux témoignage, du moins à ma connaissance. En dépit de
ce parti pris favorable, le tribunal de Francfort a conclu – voyez la page 884 –
que la déposition de Filip Müller n’était « pas très claire ». Il s’agissait
précisément de « gazages ». Notre prétendu témoin oculaire, malheureusement
pour lui, les avait placés, ces « gazages », en un lieu où, selon la
vulgate exterminationniste, ils ne pouvaient pas avoir eu lieu.
Le texte original de Filip Müller
est paru en allemand sous le titre de Sonderbehandlung. Je ne l’ai
pas encore lu. Je ne connaissais jusqu’à présent que la version américaine :
Eyewitness Auschwitz / Three Years in
the Gas Chambers
(Stein and Day, New York, 1979, xiv-180 p.). Je comparerais Filip Müller
et Christian Bernadac. Dans le numéro 571 de votre publication (Le
Nouvel Observateur du 27 octobre 1975) votre collaborateur Claude Roy
avait publié un article intitulé « La Pornographie bien tempérée ».
Il y évoquait incidemment la pornographie – non tempérée, à ses yeux, – des
livres « historiques » (les guillemets sont de lui) de Christian
Bernadac. Je me demande comment Claude Roy qualifierait le livre de Filip Müller.
Il s’y déploie un nazisme de sex-shop. Mais l’imagination de Filip Müller ne se
limite pas à l’inspiration scabreuse. Tout chez lui me paraît de la même qualité.
Si notre témoin avait pris la peine de se renseigner sur le Zyklon, il nous
aurait épargné bien des sottises sur le sujet. Comme le Zyklon est un produit qui
continue de se vendre aujourd’hui un peu partout dans le monde, y compris dans les
pays de l’Est et aux Etats-Unis, il était bien facile à Filip Müller de trouver
une information sur le sujet. Je possède plusieurs adresses ; souffrez que
je vous confie celle de l’agence parisienne : il s’agit de la société A.N.P.A.,
18, rue Goubet, 75019 Paris ; demandez M. Martin au 200-67-01 ou
rendez-lui visite : l’endroit se trouve près de la station de métro Ourcq. Sur
les crémations, Filip Müller aurait été bien inspiré de consulter quelques spécialistes ;
je peux lui recommander son homonyme français, M. Muller, de la société Muller à
Montreuil. Notre témoin aurait pu apprendre que ces fournaises en plein air, telles
qu’il nous les décrit, sont aussi inconcevables que les performances des fours
crématoires qu’il évoque à chaque page. Il est absurde d’édifier des bûchers
dans des fosses ; d’une fournaise on n’approche pas comme d’un petit feu
de bois ; des cadavres entassés pour être brûlés se carbonisent lentement
et la graisse est le premier élément qui va brûler ; les corps ne se rôtissent
pas comme des poulets à la broche en laissant couler des flots de graisse bouillante
qui court comme de l’eau (p. 180) et qui se ramasse avec des spatules pour être
reversée sur le tas (p. 184), à moins que le SS Moll, pour « compléter le
répertoire de ses distractions », ne jette « de petits enfants vivants
dans la graisse humaine bouillante » (p. 194). A la page 141 du texte anglais,
Moll est « sexually excited » pendant qu’on
jette dans la fournaise des femmes nues ; quant à son berger allemand, c’est
tout haletant qu’il regarde la scène et il en a la queue presque horizontale
(« panting, his tail almost horizontal
»). Dans le texte français la scène n’apparaît pas, non plus que les « capotes
anglaises » (French letters) de la page 143. D’ailleurs, à de très nombreuses
pages, le texte anglais et le texte français diffèrent du tout au tout. Les
éditeurs français écrivent à la page 19 : « Respectant à la lettre
son exceptionnel témoignage, nous nous sommes interdits d’y apporter la moindre
modification. Document historique à l’état brut, il nous est apparu essentiel
de le publier tel quel, dans sa forme strictement originale. » Les éditeurs
américains paraissent tout aussi sûrs de posséder une transcription exacte de l’original
allemand. On comprendra avec quelle impatience j’attends cet original allemand
ainsi que la première forme sous laquelle, en 1966 déjà, Filip Müller avait
tenté de publier son témoignage ; je suppose que je vais découvrir des versions
presque aussi inconciliables que les différentes versions du Journal d’Anne Frank. La scène du strip-tease
dans la « chambre à gaz » apparaît heureusement dans les deux textes :
l’anglais (p. 87) et le français (p. 125), quoique, là encore, sous des formes
légèrement différentes. Le texte anglais parle de « a titillating and
seductive strip-tease act » ; il est dommage que le texte
français décrive la chose sans la qualifier aussi délicatement. Mais le
résultat est le même : dans un texte comme dans l’autre les deux voyeurs
SS sont au bord de l’extase ; « ils la dévoraient des yeux, les
poings aux hanches, la matraque pendant à leur poignet » « They were standing there with arms akimbo, their whips dangling from
their wrists, and their eyes firmly glued on the woman »). C’est
alors que la belle, levant d’abord très haut la cuisse, décoche au front de l’un
des SS rêveurs un coup fantastique du talon de sa chaussure. Elle lui prend alors
son revolver et le tue.
Du début à la fin de son livre,
Filip Müller accumule ainsi les scènes les plus invraisemblables. Je suppose
que certains lecteurs s’en rendent compte. Ils s’en rendraient bien mieux compte
s’ils connaissaient la configuration topographique des lieux où ces scènes sont
censées s’être déroulées. Quiconque posséderait,
comme c’est mon cas, les vrais plans des crématoires d’Auschwitz ou de Birkenau
s’esclafferait devant les inventions de Filip Müller. D’ailleurs, celui-ci,
pour commencer, n’a fourni aucun plan, ni aucune photo de l’intérieur du crématoire
d’Auschwitz ; il est vrai que, s’il avait pris ce risque, tout lecteur
attentif aurait constaté qu’il n’y avait aucune porte, par exemple, entre la salle
des fours et la chambre froide que les exterminationnistes s’obstinent à faire
passer pour une « chambre à gaz ». Quand on sait que le Zyklon est inflammable
et explosible, on voie encore plus mal comment il aurait pu être employé à des
doses massives près des bouches des fours crématoires… et cela sans que les
chauffeurs s’en doutent le moins du monde. Car l’équipe ou les équipes de
chauffeurs ignoraient que les corps qu’on leur laissait à brûler étaient ceux
des malheureux « gazés ». « A leur arrivée, les corps des gazés
qui gisaient nus dans la chambre à gaz, que l’on venait d’aérer, semblaient
être tombés du ciel » (p. 75). Filip Müller donne bien les plans des crématoires
de Birkenau, mais non sans diverses tricheries et sans livrer les dimensions
des pièces et sans indiquer la hauteur des cheminées, par exemple. S’il l’avait
fait, le lecteur aurait cru découvrir Lilliput là où, d’après les récits de Filip
Müller et de bien d’autres témoins, il imaginait de gigantesques constructions.
Ce livre n’est manifestement qu'une
compilation d’ouvrages à grand succès commercial comme ceux de Nyiszli, de Höss
ou de Vrba. Filip Müller a été d’une grande prudence commerciale. Il a cité ses
sources. Il l’a fait en se présentant comme un héros, un saint, un martyr qui a
eu l’occasion de rencontrer à Auschwitz d’autres personnes de sa trempe. Aussi
voit-on mal ces survivants ou leurs ayants droit se plaindre d’avoir été pillés.
Il s'est habilement prémuni contre la mésaventure arrivée à Sylvain Reiner. En
1969, ce dernier avait publié Et la Terre sera pure (Grands documents
contemporains, Fayard, 347 p.). Une partie du livre n’était qu’un démarquage de
celle de Nyiszli – Médecin à Auschwitz – qui n’est d’ailleurs qu’un faux avéré comme
l’a démontré magistralement Paul Rassinier et comme j’en ai eu, de mon côté, la
confirmation. Sylvain Reiner, menacé de graves ennuis à la suite de ce larcin indiscret,
avait dû retirer le livre de la vente et remplacer les pages litigieuses par ...
un nouveau texte. Le mieux est décidément d’opérer comme Martin Gray qui, pris la
main dans le sac, n’essaie même pas de nier (voyez dans New Statesman, 2 novembre
1979, p. 673, ce qu’en dit la journaliste Gitta Sereny qui a enquêté sur la question).
Dans votre « document de la semaine
» vous ne reproduisez que la préface de Claude Lanzmann au livre de Filip
Müller. Vous ne citez aucun extrait du livre. Je vous comprends. Aucune page du
livre ne résisterait à une citation. Il vaut mieux agir avec de pareils témoins
des « chambres à gaz » comme certains, qui croient aux Martiens, agissent
avec leurs Martiens. Ils les gardent au placard et annoncent à sons de trompe
qu’ils possèdent à portée de main un Martien. Il va de soi que ce Martien n’apparaîtra
comme un Martien qu’aux yeux de ceux qui ont la foi. Claude Lanzmann est de cette
religion-là. Pas moi. Cependant, à sa place, je n’aurais pas donné en introduction
au livre de Filip Müller un texte falsifié de Himmler. Une coupure – non signalée
– d’une douzaine de lignes, sans compter une brusque interruption du texte de Himmler,
sans oublier de détacher complètement ce texte de son contexte, tout cela permet
évidemment de faire dire ce que l’on veut au prétendu organisateur d’un
prétendu « génocide ».
Il y a certainement du vrai dans le
témoignage de Filip Müller, puisque, aussi bien, l’affabulation n’est jamais
que l’art d’accommoder la vérité. Pour répondre à ceux qui s’étonnent nettement
qu’on puisse affabuler à tout va afin de se faire passer pour un héros, pour un
martyr ou pour un saint ou pour gagner de l’argent ou pour assouvir une passion
politique ou autre, je conseille de lire les témoignages « d’une vérité criante »
qu’ont rendus sur des « gazages » reconnus aujourd’hui comme fictifs
des prêtres, des aumôniers, des frères, des évêques ou, dans des procès-verbaux
circonstanciés, certains hommes de science. « Last but not least », le
texte qui a servi probablement de matrice à tous les textes officiels sur les
prétendus « gazages » d’Auschwitz date au 6 mai 1945. C’est le
document, de Nuremberg, URSS-008. Il porte, sur cinq signatures soviétiques,
deux illustres signatures : celle du généticien Lyssenko, ce fameux académicien
quelque peu tricheur, et celle du métropolite Nicolas. Mais qui était donc ce métropolite-là ?
Celui-là même, je pense, qui avait signé le rapport de la Commission
extraordinaire de l’Etat soviétique qui prouvait admirablement que Katyn était
un crime… allemand. Pour un peu, le juge soviétique du Tribunal militaire international
allait faire porter la responsabilité de ce massacre au compte des nazis. Son
nom était I. T. Nikitschenko. Peut-être, dans un moment de lucidité, les
assesseurs américain, britannique et français du juge soviétique ont-ils fait taire
leur passion de juges-accusateurs pour se rappeler le brillant passé de leur homologue
soviétique. I. T. Nikitschenko avait été juge au premier des procès de Moscou
(vous pouvez, sur ce point, consulter à la Bibliothèque de documentation internationale contemporaine
de Nanterre la Pravda du 20 août 1936, p 4., lignes 6 et 7 de la première colonne).
Non, voyez-vous, plus les années
passent, plus le délire tend à se déconstruire de lui-même. La nouvelle religion
est mal partie. Je sais quelles souffrances réelles et quelles illusions il y a
derrière la religion de l’« holocauste ». Il ne me semble pas que la
tâche du Nouvel Observateur doive être
de servir une religion quelconque. Je me rends compte, croyez-le bien, de la
panique et du vertige qu’éprouvent les tenants de cette foi quand on vient leur
dire qu’ils ont été affreusement trompés. Je comprends jusqu’à un certain point
qu’ils cherchent refuge dans l’incantation. Je comprends qu’ils répètent des
formules et qu’ils ressassent des slogans dont le vide par moments les affole. Il
y a dans la préface de Claude Lanzmann, dans ses formules creuses et hyperboliques,
dans son néant rhétorique, un désarroi auquel personne de sensible à la
détresse humaine ne peut rester indifférent. J’imagine le premier chrétien à qui
la lecture de Fontenelle ou de Voltaire a pu faire entrevoir un jour que le diable
n’existait peut-être pas. Il a dû penser : « Mais si le diable
n’existe pas, Dieu non plus n’existe pas ! Et s’il en est ainsi, que
penser de la divinité de Jésus-Christ, de l’immaculée Conception, des martyrs,
des mystères, des dix commandements, des péchés, de la morale ? Il n’y aurait donc plus de morale ! ».
Ce chrétien a pu ajouter « C’est intolérable. Seuls des esprits diaboliques
peuvent prétendre que le diable n’existe pas. D’ailleurs, il existe. C’est
bien prouvé. Mille procès l’ont prouvé. Des magistrats intègres ont rassemblé
des milliers de preuves irréfutables. Des milliers d’aveux ont été obtenus. Et l’on
voudrait nous faire croire que ces magistrats étaient des menteurs ou des criminels.
C’est invraisemblable. C’est trouver du faux partout, et de la vérité nulle part. »
Le désarroi de ce chrétien, je le comprends. Ce désarroi, il va essayer d’y remédier
par une répétition de plus en plus exacerbée des gestes ou des paroles rituels
et, s’il a le pouvoir pour lui, il l’utilisera pour exercer une violence
ouverte ou feutrée contre son adversaire et contre tout ce qui, à ses yeux, incarne
le diable.
Les tenants de la religion de
l’« holocauste » s’affolent de la même façon. Ils imaginent, pour
certains d’entre eux, l’Etat d’Israël en train de perdre ainsi l’arme n° 1 de
sa propagande mondiale. D’autres voient avec terreur les populations musulmanes
ou les étudiants musulmans en train de découvrir qu’ils ont été les victimes
non seulement d’une politique de conquête coloniale – quel est l’Etat qui ne
s’est pas fondé dans le crime et le sang ? – mais aussi d’une gigantesque
filouterie. D’autres pensent aux jeunes Allemands s’avisant de ce qu’ils ont
été cruellement trompés par les pouvoirs en place, par leurs professeurs, par
leurs hommes politiques, par leurs prêtres et ils se disent : « La plus
grande entreprise de diffamation de tous les temps, la plus parfaite, la plus complète
a pris place au XXe siècle ; jamais un pays n’a été sali comme Allemagne
l’a été, et cela avec son propre consentement, avec sa rage à se punir, à s’humilier
à se flageller et… à payer ! ».
Pour ma part, en tant d’années de
recherches, croyez bien que j’ai eu devant les yeux des témoignages de cette peur
panique ou de cette gêne. J’ai vu les hommes les plus fins me tenir des raisonnements
d’enfant paniqué pour me supplier d’abandonner mes recherches. Personnellement,
je ne me laisserai pas arrêter par des considérations politiques. Sur ce chapitre,
je dirais seulement qu’en politique on ne peut pas faire de prévision. Le
chancelier Schmidt doit bien savoir qu’il trompe gravement son peuple, mais, d’un
autre côté, peut-il le détromper maintenant ? Serait-il un homme politique
si, tout d’un coup, il se mettait à servir la vérité au lieu de servir les intérêts
de l’Etat qu’il dirige ? Certainement pas.
Aucun changement brusque ne se
produira lorsqu’il apparaîtra que l’« holocauste » est un mensonge historique.
Les religions ne disparaissent d’ailleurs que très lentement et pour laisser place
à d’autres religions. Il se trouve que personnellement je préfère aller de la
foi à la raison.
Bien à vous
R. Faurisson
Vichy, samedi 10 mai 1980
à Monsieur Jean Daniel
Le Nouvel Observateur
Monsieur,
Votre lettre du 7 mai, postée le
8, est parvenue à mon domicile de Vichy le 9 mai ; j’étais à Paris, ma
femme me l’a lue au téléphone : j’ai immédiatement téléphoné à votre collaboratrice
Geneviève Cattan qui m’a promis de vous faire tenir oralement la réponse suivante :
Jean Daniel s’est trompé : il a pris pour mienne une pensée que je ne faisais
que rapporter.
C’est ce que j’ai l’honneur de
vous confirmer par la présente lettre.
Selon vous j’aurais écrit : « les
tenants de l’holocauste s’affolent dans la crainte de perdre l’arme n° 1 de la propagande
israélienne auprès des Allemands et des Arabes ». Vous allez jusqu’à
placer toute cette phrase – qui n’est que de vous – entre des guillemets qui
font croire que cette phrase est de moi et que je vous l’aurais écrite. Je considère
ce fait comme d’autant plus grave que vous m’écrivez qu’il ne vous reste plus
qu’à me « dénoncer » (c’est votre propre terme) et, en P.S., vous ajoutez :
« Si je vous envoie cette lettre, c’est pour la transmettre à certains de
mes amis que vous avez, dans un diabolique machiavélisme, induits en erreur en leur
dissimulant vos arrière-pensées. »
Je vous fais donc remarquer, pour
ma part, que non content de déformer très gravement ma pensée, vous allez jusqu’à
envisager de répandre le résultat de cette déformation.
A la fin de ma lettre de quatre
pages, je vous parlais du « désarroi » de Claude Lanzmann. Perdant tout
sang-froid et toute capacité de discernement critique, le malheureux est allé
offrir sa caution au prétendu témoignage de Filip Müller sur les prétendus «
gazages » d’Auschwitz. Je vous fournissais quelques exemples des élucubrations
malodorantes de Filip Müller et des mésaventures que celles-ci lui avaient values
de la part du tribunal de Francfort. Je n’aurais pas été en peine d’allonger la
liste. Reportez-vous, par exemple, aux pages 154 et 155 de la traduction. Notre
héros est dans la « chambre à gaz ». Lui qui, d’habitude, y enfourne les gens,
a décidé cette fois-ci d’en finir avec la vie. Il s’est glissé parmi les victimes.
Et pourtant il ne mourra pas. Tout à coup quelques jeunes filles nues se
pressent autour de Lui ; « elles étaient toutes dans la fleur de
l’âge ». Elles s’étonnent de la présence de leur bourreau. Elles lui disent
qu’il ne doit pas mourir, lui, mais leur survivre pour ensuite porter
témoignage. L’une d’elles demande qu’après sa mort il lui retire une chaîne en
or pour la remettre à Sacha de la part de son amie Jana. Et Filip Müller
d’ajouter : « J’étais abasourdi par tant de courage et de sang-froid en de
telles circonstances. Avant même d’avoir pu réfléchir à ma réponse, les jeunes
filles surmontèrent mon opposition. Elles m’empoignèrent par les bras et les
jambes et me traînèrent littéralement jusqu’à la porte de la chambre à gaz,
malgré ma résistance. Puis elles me relâchèrent et me poussèrent dehors de
toute leur force. J’échouai au milieu des SS qui se tenaient en
faction. ». Toute la suite du récit est de cette veine-là. On ne sait pas
si Filip Müller s’était déshabillé pour entrer dans la « chambre à gaz » et si
c’est tout nu qu’à la sortie – manu
militari – de la « chambre à gaz » il s’est hâté de reprendre son travail
de routine. Au moins sait-on une chose. C’est grâce à de jeunes beautés
perspicaces, héroïques et « dans la fleur de l’âge » qu'il a échappé à une
mort héroïque. En revanche, on ignore comment en trois ans il est passé à
chaque fois au travers des « sélections » qui s’abattaient, paraît-il,
chroniquement, sur les membres du « Sonderkommando ».
Je vous disais dans ma lettre
qu’à l’instar de Claude Lanzmann : « Les tenants de la religion de
l’“holocauste” sont en train de s’affoler. » Je ne parle pas de
l’« holocauste », mais de la « religion de l’holocauste » et toute une partie de me lettre insiste
sur le caractère religieux du phénomène. Je tiens beaucoup à cette précision.
J’y tiens d’autant plus que les fidèles de cette religion trouvent que je suis
le diable. Vous-même, vous croyez me découvrir un « diabolique
machiavélisme ». Vous vous attribuez à vous-même une « extrême candeur ».
Ce sont là vos propres mots. Ils étonnent de la part d’un directeur de magazine
parisien. Ils étonnent moins de la part de quelqu’un qui a pris pour argent
comptant les inventions de M. Claude Martin sur mon compte. Jean Daniel a
accueilli ainsi au début de l’année 1979 un texte où M. Claude Martin, sous le
couvert de la simple information, tentait de mener à bien une campagne
électorale afin d’être élu président de l’université Lyon-2. Je ne saurais en
vouloir à Jean Daniel puisqu’il me fait l’aveu de son « extrême
candeur ». Il croit à l’« holocauste ». Il croit aux « six
millions ». Il croit même, selon sa propre formule quelque peu redondante,
à « l’holocauste de l’extermination de six millions d’entre [les survivants] ».
Jean Daniel adopte même le ton du prophète judéo-chrétien et, à l’adresse d’un
Faurisson intrinsèquement pervers, il s’écrie : « Rassurez-vous : le temps va
venir, probablement, où vous serez entendu par les massacreurs, les racistes et
les hérauts de la haine. Le jour où vous sortirez de votre solitude, c’est
toute la civilisation judéo-chrétienne qui, une fois encore, sera niée. »
Cher Jean Daniel, permettez-moi
de vous taquiner ainsi. N’y voyez pas malice.
Mais vous-même finissez de me
prêter des pensées que je n’ai jamais formulées. Je ne vous ai pas dit sur les
Arabes ou sur les Allemands ce que vous me faites dire. Même ce qui concerne
l’« holocauste » considéré comme l’arme n° 1 de la propagande
mondiale de I’Etat d’Israël n’est pas de moi. Si vous m’aviez lu avec un peu de
soin, vous auriez vu que je me contente d’énumérer des pensées qui sont celles de la partie adverse. Vous avez commis
un contresens. Cette réflexion sur l’arme n° 1, elle n’est pas de moi mais de
personnes qui me sont totalement opposées (ce qui d’ailleurs ne veut pas dire
que ces personnes me paraissent délirer en la circonstance). Je vais vous
donner ma source. La formule que vous croyez mienne est du sociologue
australien d’origine juive Dr W.-D. Rubinstein (School of Social Sciences,
Deakin University). Vous la trouverez dans Nation Review du 21 juin 1979, p.
639, sous la forme suivante : « were the Holocaust shown to be a
hoax, the number one weapon in Israel’s propaganda armoury disappears »
(« si l’Holocauste apparaissait comme une imposture, l’arme n° 1 de
l’arsenal de la propagande d’Israël disparaît »). Et je vous rappelle que ce
sociologue est l’adversaire le plus ardent de John Bennett, cet avocat
impavide, secrétaire à Melbourne de l’équivalent, en France, de notre Ligue des
droits de l'homme, et qui dénonce l’« holocauste » comme une imposture.
Vous n'aviez pas le droit de vous
tromper comme vous l’avez fait. Mes phrases étaient claires jusque dans leur
construction. Chacune de mes trois phrases commençait de la même façon ; 1re
phrase : « Ils imaginent... » ; 2e phrase : «
D’autres voient... » ; 3e phrase : « D’autres pensent... ». A chaque fois il
s’agit non pas de moi, mais des tenants de la nouvelle religion, une religion
qui, pour moi, est si mal partie.
Mais vous aurez droit a une
confidence sur mon opinion en ce qui concerne I’Etat d’Israël : pour moi il
devrait appartenir aussi bien aux juifs qu’aux musulmans et toute partie de la
terre devrait pouvoir appartenir à tout le monde. Si un Etat musulman succédait
à un Etat juif, je ne crois pas qu’il y aurait moins de violence. Les «
Etats », cela ne me dit rien qui vaille. Telle est, non pas mon opinion
définitive, mais mon humeur présente. Mon heure de « candeur ». D’« extrême
candeur » peut-être. Vous voyez bien que nous ne sommes sans doute pas
aussi différents l’un de l’autre que vous le croyez.
En attendant de tirer ce point au
clair, je vous rappelle mes demandes : soyez assez aimable d’abord pour me
donner les noms de ces témoins de « chambres à gaz » que vous m’aviez
promis l’année dernière et ensuite pour publier ma lettre du 3 mai. Je vous
demande d’envoyer copie de la présente lettre à M. Claude Martin et à tous ces
amis auxquels vous avez écrit pour me « dénoncer » auprès d’eux.
Je vous en remercie.
Bien à vous
R. Faurisson